Résister à la tentation ? La maîtrise de soi rend malheureux

La maîtrise de soi s'apprend. Renoncer, dire "non" - la discipline de résister aux tentations est considérée comme une qualité importante sur le chemin du succès. Michail Kokkoris, chercheur à l'université de WU, s'est penché sur la question en collaboration avec des collègues des universités de Cologne et de Zurich : quel est l'impact d'un contrôle strict de soi sur nous et notre état d'esprit et s'il nous rend plus heureux ?

Une étude menée à l'échelle européenne a permis de déterminer si l'envie de sucré dépendait du type de personnalité. (Image symbolique : Unsplash)

Les scientifiques de cette étude sur la "maîtrise de soi" ont pu montrer que les personnes qui prennent des décisions plus "instinctives" que rationnelles perçoivent une forte maîtrise de soi comme n'étant pas authentique et décident consciemment de ne pas le faire. L'étude a été publiée dans le Journal of Personality and Social Psychology.

Manger des fruits plutôt que des sucreries, utiliser les escaliers plutôt que l'ascenseur, travailler et étudier plutôt que de se prélasser au soleil : la maîtrise de soi et la discipline sont considérées comme des facteurs de réussite essentiels pour atteindre des objectifs à long terme tels que la réduction du poids corporel, l'amélioration de la forme physique ou même le prochain échelon de l'échelle professionnelle. Mais nous sentons-nous vraiment toujours mieux et plus forts lorsque nous résistons aux tentations ? La maîtrise de soi nous rend-elle également plus satisfaits ? C'est la question que s'est posée Michail Kokkoris, chercheur à l'université de WU (Institut für Marketing und KonsumentInnenforschung), en collaboration avec Erik Hoelzl de l'université de Cologne (GER) et Carlos Alós-Ferrer de l'université de Zurich (CHE).

Les résultats de l'étude montrent clairement que l'autocontrôle ne conduit pas toujours à une plus grande satisfaction vis-à-vis d'une décision. Cela dépend plutôt de ce qu'une personne considère comme une base légitime pour ses décisions.

Une question de type : tentation versus authenticité
Dans 11 études au total, les auteurs de l'étude ont examiné si le type de personnalité des personnes jouait un rôle décisif dans la perception du contrôle de soi. Ce que l'on appelle la "rationalité profane" décrit la tendance d'une personne à prendre ses décisions principalement sur la base de justifications rationnelles plutôt que sur celle de ses sentiments. Les résultats de l'étude ont montré que les personnes ayant une faible rationalité profane, c'est-à-dire qui prennent des décisions de manière plus intuitive et émotionnelle que rationnelle, ressentent la maîtrise de soi ou la résistance à la tentation de manière moins satisfaisante que les décideurs rationnels.

Les auteurs de l'étude ont également trouvé la raison de ce phénomène - Mikhaïl Kokkoris explique : "Les personnes qui se fient davantage à leurs sentiments pour prendre des décisions se sentent moins authentiques lorsqu'elles renoncent. Elles ont l'impression de réprimer leurs besoins et leurs envies et de se trahir ainsi elles-mêmes. Paradoxalement, pour eux, la perte de la maîtrise de soi signifie donc en même temps la découverte de soi. Inversement, les personnes ayant un haut niveau de rationalité laïque considèrent la maîtrise de soi comme une "recette pour être heureux".

Céder à la tentation ne signifie pas toujours perdre le contrôle
Selon l'étude, la maîtrise de soi ne doit pas seulement être considérée comme une capacité, mais aussi comme un choix et une préférence conscients d'une personne. "Notre étude nous permet de conclure qu'il est possible que nous ne perdions pas simplement le contrôle de nous-mêmes en mangeant du chocolat, par exemple, mais que nous choisissions délibérément de ne pas nous contrôler afin de rester fidèles à nous-mêmes", explique Kokkoris. "Il reste indéniable que le contrôle de soi est un pilier important de notre société, pourtant la recherche a jusqu'à présent totalement ignoré le fait que le contrôle de soi n'est pas exclusivement perçu comme positif".

Vers l'étude :
Pour répondre à leurs questions de recherche, les auteurs de l'étude ont eu recours à plusieurs méthodes pour un total de 11 études avec environ 3.000 participants. Par exemple, dans l'une des études expérimentales, des étudiants au régime ont dû choisir entre le chocolat et les carottes dans un laboratoire et ont ensuite été interrogés sur leurs sentiments. Pour une autre étude, on a demandé à des participants à l'étude aux États-Unis, peu avant Pâques, de tenir un journal quotidien pendant une semaine sur les tentations et les sentiments des dernières 24 heures.

Vers le papier : Kokkoris, M.D., Hoelzl, E., & Alós-Ferrer, C. (2019). True to which self ? Lay rationalism and decision satisfaction in self-control conflicts. Journal of Personality and Social Psychology, 117(2), 417-447.

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